Déterminer quand il y a lieu d’initier ou de poursuivre le traitement  aux opioïdes contre la douleur chronique 

1. Les traitements non médicamenteux et les traitements médicamenteux  non opioïdes sont à privilégier pour soulager la douleur chronique.  Les cliniciens ne doivent envisager le traitement aux opioïdes qui s’ils prévoient que l’amélioration attendue de la douleur et du fonctionnement l’emporteront sur les risques pour le patient.  Si les opioïdes sont choisis, ils doivent être accompagnés de traitements non médicamenteux ou de traitements médicamenteux non opioïdes, selon le cas. 

Les patients souffrant de douleur doivent recevoir un traitement qui procure les plus grands bienfaits par rapport au risque encouru.  Il existe plusieurs traitements non médicamenteux qui peuvent soulager la douleur chronique y compris la physiothérapie, la perte de poids dans le cas d’arthrose du genou, des psychothérapies telles que la thérapie cognitivo-comportementale (TCC) et certaines techniques interventionnelles.  Dans les cas d’arthrose du genou ou de la hanche, la kinésithérapie (modalité primordiale de la physiothérapie) soulage la douleur et améliore le fonctionnement immédiatement après le traitement et ces améliorations sont durables.  Nos lignes directrices antérieures recommandaient fortement les exercices d’aérobie, aquatiques et de résistance dans le cas de patients souffrant d’une arthrose du genou ou de la hanche.  La kinésithérapie peut également soulager la douleur et améliorer le fonctionnement en cas de lombalgie et peut améliorer le bien-être général et le fonctionnement physique en cas de fibromyalgie.  Les traitements interventionnels tels que l’arthrocentèse et l’injection intraarticulaire de glucocorticoïdes pour la douleur associée à la polyarthrite rhumatoïde ou l’arthrose et l’injection sous-acromiale de corticostéroïdes pour les affections de la coiffe des rotateurs, peuvent soulager la douleur et améliorer le fonctionnement à court terme. 

Plusieurs traitements médicamenteux non opioïdes (y compris l’acétaminophène, les AINS et certains antidépresseurs et anticonvulsivants) sont efficaces pour soigner la douleur chronique. En particulier, l’acétaminophène et les AINS sont efficaces en cas d’arthrite et de lombalgie.  Certains anticonvulsivants tels que la prégabaline (Lyrica) et la gabapentine peuvent soulager les douleurs de la neuropathie diabétique et de ladouleur postherpétique.  La prégabaline, la gabapentine et la carbamazépine (Tegretol) sont approuvés pour le traitement de certains états de douleur neuropathique, et la prégabaline est approuvée pour la prise en charge de la fibromyalgie.  Chez les patients atteints ou non de dépression, les antidépresseurs tricycliques et les IRSN sont des antalgiques efficaces dans les cas de douleur neuropathique, y compris la neuropathie diabétique et la névralgie postherpétique, souvent à plus faible dose et prenant moins longtemps à faire effet que dans le traitement de la dépression.  Les tricycliques et les IRSN peuvent aussi soulager les symptômes de la fibromyalgie.  L’IRSN duloxétine (Cymbalta) est approuvé pour le traitement de la neuropathie diabétique et de la fibromyalgie.  

Parce que les patients souffrant de douleurs chroniques manifestent souvent une dépression concomitante et du fait que la dépression peut exacerber les symptômes physiques y compris la douleur, il est probable que les patients souffrant de douleur et de dépression en cooccurrence retireront davantage de bienfaits des médicaments antidépresseurs.  Les traitements médicamenteux non opioïdes ne sont pas généralement associés aux troubles de consommation de drogues, et le nombre de surdoses mortelles reliées aux médicaments non opioïdes ne constituent qu’une fraction de celles reliées aux médicaments opioïdes.  Il reste que certains risques sont associés aux traitements médicamenteux non opioïdes, en particulier chez les patients âgés, les patientes enceintes et les patients atteints de certaines comorbidités comme une maladie cardiovasculaire, rénale, gastrointestinale ou hépatique. 

Bien que les opioïdes réduisent la douleur quand il s’agit d’un usage à court terme, les preuves manquent pour affirmer que le soulagement de la douleur est durable et  que le fonctionnement ou la qualité de vie s’améliorent lors d’un traitement prolongé aux opioïdes.  L’usage à long terme des opioïdes contre la douleur chronique est associé à des risques élevés, dont le risque accru de troubles de consommation d’opioïdes, de surdoses, d’infarctus du myocarde et de blessures résultant d’accidents de la route. 

La gestion intégrée de la douleur exige une coordination des aspects médicaux, psychologiques et sociaux des soins de santé et comprend les soins primaires, les soins en santé mentale et les services de spécialistes au besoin.  Parmi les options peu dispendieuses pour intégrer l’exercice physique, notons la marche rapide dans des lieux publics et l’utilisation d’installations récréatives publiques pour l’exercice en groupe.  La thérapie cognitivo-comportementale aborde les facteurs psychosociaux contribuant à la douleur et améliore le fonctionnement.  Les cliniciens de soins primaires peuvent intégrer des éléments de la TCC à leur pratique en encourageant les patients à s’impliquer activement dans le plan de soins, en appuyant les patients dans la poursuite d’activités bénéfiques mais qui pourraient leur causer de l’anxiété, comme les exercices, ou en leur enseignant des techniques de relaxation et des stratégies d’adaptation. 

Le diagnostic peut permettre de déterminer des interventions ciblant particulièrement une maladie qui pourront faire diminuer ou disparaître la douleur, par exemple un contrôle glycémique optimal pour empêcher la progression de la neuropathie diabétique, la prise d’immunomodulateurs pour la polyarthrite rhumatoïde, des séances de physiothérapie ou d’ergothérapie pour corriger la posture, renforcer les muscles ou parer aux effets de mouvements répétitifs au travail qui contribuent aux douleurs musculosquelettiques ou encore la chirurgie pour soulager la douleur mécanique ou de compression. 

Les opioïdes ne doivent pas être considérés comme un traitement de première intention pour la douleur chronique (c.-à-d. une douleur qui se prolonge ou qu’on prévoit se prolonger 3 mois ou plus après la période normale de guérison des tissus) sauf pour le soin d’un cancer actif, les soins palliatifs ou les soins en fin de vie.  Cela ne signifie pas que les patients doivent connaître des « échecs » successifs de traitements non médicamenteux et médicamenteux non opioïdes avant qu’on fasse appel aux opioïdes.  Il faut plutôt peser les risques par rapport aux bienfaits escomptés spécifiques au contexte clinique avant de commencer le traitement aux opioïdes.  De plus, quand des antalgiques opioïdes sont utilisés, leur efficacité est plus probable s’ils sont intégrés à un traitement non médicamenteux. 

2.  Avant le début  d’un traitement aux opioïdes pour la douleur chronique, les cliniciens doivent établir avec chaque patient des objectifs de traitement, y compris des buts réalistes en terme de fonctionnement et de douleur, et considérer comment le traitement aux opioïdes sera arrêté si les bienfaits ne compensent pas suffisamment les risques.  Les cliniciens ne doivent poursuivre le traitement aux opioïdes que si le soulagement de la douleur et l’amélioration du fonctionnement sont significatifs sur le plan clinique et l’emportent sur les risques pour la sécurité du patient. 

De nombreux patients abandonnent le traitement aux opioïdes pour la douleur chronique non-cancéreuse en raison d’effets indésirables ou d’un soulagement insuffisant; néamoins chez les patients qui peuvent poursuivre le traitement aux opioïdes pendant au moins 6 mois, les études ne rapportent qu’une faible possibilité d’éprouver un soulagement cliniquement significatif de la douleur, et montrent aussi des preuves insuffisantes d’une amélioration du fonctionnement ou de la qualité de vie.  Ces résultats laissent à penser qu’il est très difficile pour les cliniciens de prédire pour quel patient spécifique les bienfaits des opioïdes pour la douleur chronique l’emporteront sur les risques d’un traitement continu.  Le traitement aux opioïdes ne doit pas être initié sans « stratégie de sortie » à être mise en œuvre si le traitement s’avère inefficace. 

Avant d’initier le traitement aux opioïdes pour la douleur chronique autre qu’en rapport avec un cancer actif, des soins palliatifs ou des soins de fin de vie, le clinicien doit déterminer la méthode d’évaluation de l’efficacité du traitement et établir avec le patient des objectifs de traitement.  Les cliniciens qui reçoivent de nouveaux patients qui prennent déjà des opioïdes doivent établir des objectifs de traitement avant de poursuivre le traitement aux opioïdes.  En fixant ce plan de traitement à l’avance, les cliniciens et les patients définissent clairement leurs attentes quant aux modalités de prescription et de surveillance des opioïdes ainsi qu’aux situations où s’imposera l’arrêt des opioïdes ou la diminution progressive des doses (par exemple, si les objectifs de traitement ne sont pas atteints, si les opioïdes ne sont plus nécessaires ou si des événements indésirables mettent le patient à risque) afin d’améliorer la sécurité du patient. 

Les objectifs doivent porter sur l’amélioration tant au plan du soulagement de la douleur que du fonctionnement (et par conséquent de la qualité de vie).  Pour évaluer les résultats du traitement chez les patients, les cliniciens peuvent faire appel à des instruments validés tels que l’échelle PEG pour évaluer l’intensité de la douleur et la perturbation de la qualité de vie et des activités générales (Pain average, interference with Enjoyment of life, and interference with General Assessment Scale).  L’amélioration significative au plan clinique se situe à 30 % d’amélioration à la fois au plan de la douleur et du niveau fonctionnel.  La surveillance de la progression vers des buts fonctionnels axés sur le patient (p. ex., promener le chien ou marcher autour du pâté de maisons, reprendre un travail à temps partiel, participer à des activités sportives ou récréatives en famille) peut également faire partie de l’évaluation de l’amélioration du fonctionnement.  Parce que la dépression, l’anxiété et d’autres comorbidités psychologiques sont souvent en cooccurrence avec la douleur et peuvent perturber son atténuation, les cliniciens doivent utiliser des instruments validés pour évaluer ces points et assurer le traitement optimal de ces états de santé.  Si les patients recevant un traitement aux opioïdes pour la douleur chronique ne constatent pas d’amélioration significative ni du niveau de douleur ni du fonctionnement par rapport à ce qui était le cas avant de commencer le traitement aux opioïdes, les cliniciens doivent envisager de travailler avec le patient afin de diminuer et de terminer les prises d’opioïdes, et de faire appel aux traitements non médicamenteux et médicamenteux non opioïdes pour la gestion de la douleur. 

PEG : Échelle d’évaluation en trois points de l’intensité de la douleur et la perturbation de la qualité de vie et des activités générales

1.  Quel est le chiffre qui décrit le mieux la douleur que vous avez ressentie en moyenne pendant la dernière semaine?

     0        1       2       3       4       5       6       7       8       9       10

     Pas de douleur                                                                              La pire douleur possible

2.  Quel est le chiffre qui décrit le mieux comment votre douleur a troublé votre qualité de vie pendant la dernière semaine?

     0        1       2       3       4       5       6       7       8       9       10

     Pas de douleur                                                                              La pire douleur possible

3.  Quel est le chiffre qui décrit le mieux comment votre douleur a troublé vos activités générales pendant la dernière semaine?

      0        1       2       3       4       5       6       7       8       9       10             

Pas de douleur                                                                              La pire douleur possible 
 

3.  Avant de commencer un traitement aux opioïdes et à intervalles par la suite, le clinicien doit discuter avec son patient des risques connus et des bienfaits réalistes du traitement aux opioïdes ainsi que des responsabilités du patient et du clinicien dans la gestion du traitement. 

Bien des patients manquent d’information sur les opioïdes et certains cliniciens ne saisissent pas les occasions propices pour les éduquer adéquatemment  au sujet de la sécurité. Parmi les éléments essentiels à communiquer aux patients avant de commencer le traitement aux opioïdes et périodiquement au cours du traitement, notons les bienfaits réalistes escomptés, les dommages courants et graves ainsi que les attentes en ce qui concerne les responsabilités du clinicien et du patient pour l’atténuation des risques associés au traitement aux opioïdes. 

Le clinicien doit impliquer le patient dans les décisions touchant l’initiation ou la poursuite d’un traitement aux opioïdes.  Étant donnés les risques potentiellement élevés du traitement aux opioïdes à long terme, le clinicien doit s’assurer, avant d’initier ou de poursuivre ce traitement, que le patient est mis au courant des bienfaits des opioïdes, des dommages potentiels issus de ce traitement et des autres options de traitement disponibles.  On encourage le clinicien à discuter ouvertement et franchement avec son patient pour éclairer leur décision conjointe d’entamer ou de poursuivre, ou non, un traitement aux opioïdes. 

Il importe de considérer les points suivants : 

  • Être explicite et réaliste concernant les bienfaits escomptés des opioïdes, en expliquant que malgré la réduction de douleur qu’apporte la prise d’opioïdes à court terme, les preuves font défaut pour dire que les opioïdes soulagent la douleur et améliorent le fonctionnement quand ils sont pris à long terme, et qu’il est peu probable qu’ils soulagent complètement la douleur. 

  • Insister sur le fait que l’amélioration du fonctionnement est le but premier du traitement et que le fonctionnement peut s’améliorer même en présence de la douleur. 

  • Signaler au patient les effets indésirables graves des opioïdes, y compris la dépression respiratoire pouvant être fatale et l’apparition d’un trouble de la consommation d’opioïdes qui pourra le faire souffrir et l’empêcher de remplir les obligations importantes de ses fonctions. 

  • Signaler au patient les effets indésirables communs des opioïdes tels que la constipation, l’assèchement de la bouche, les nausées, les vomissements, la somnolence, la confusion, la tolérance, la dépendance physique et les symptômes de sevrage lorsque cesse la prise d’opioïdes.  Pour contrer la constipation associée à la prise d’opioïdes, conseiller au patient de s’hydrater davantage, d’augmenter sa consommation de fibres et de continuer ou d’augmenter son activité physique.  Des émollients ou des laxatifs pourraient s’avérer nécessaires. 

  • Discuter des effets que pourraient avoir les opioïdes sur la capacité de conduire un véhicule en toute sécurité, surtout au début du traitement, au moment d’une augmentation du dosage ou quand d’autres dépresseurs du système nerveux central tels que l’alcool ou les benzodiazépines sont consommés simultanément. 

  • Discuter des risques accrus de troubles de consommation, de dépression respiratoire et de mortalité lorsque le dosage est plus élevé, en insistant sur l’importance de ne prendre que la quantité d’opioïdes prescrite, c.-à-d. ne pas en prendre une plus grande quantité ni plus fréquemment. 

  • Repasser avec le patient les risques  accrus de dépression respiratoire lorsque les opioïdes sont accompagnés de benzodiazépines ou d’autres sédatifs, d’alcool, de drogues illégales telles que l’héroïne ou d’autres opioïdes. 

  • Discuter des risques pour les membres du ménage et d’autres personnes si les opioïdes sont partagés avec des gens à qui ils ne sont pas prescrits, y compris la possibilité d’une surdose avec la dose prescrite au patient ou même à plus faible dose, sans compter le risque d’ingestion accidentelle par de jeunes enfants.  Discuter des options de rangement des opioïdes dans un endroit sécurisé, préférablement verrouillé, et des options d’élimination sécuritaire des opioïdes non utilisés. 

  • Discuter de l’importance des évaluations périodiques pour s’assurer que les opioïdes aident le patient à atteindre ses objectifs et pour donner l’occasion de cesser la prise d’opioïdes et d’envisager des options de traitement non médicamenteux ou médicamenteux non opioïde, si les opioïdes ne font pas effet ou causent du tort.

  • Discuter des précautions prévues pour réduire les risques, y compris les renseignements du programme de surveillance des médicaments d’ordonnance et les analyses d’urine. Envisager de parler de la prise de naloxone pour renverser les effets d’une surdose.  

  • Considérer la possibilité que les limites cognitives du patient puissent entraver la bonne gestion du traitement aux opioïdes (dans le cas de la personne âgée, notamment) et si c’est le cas, déterminer si un soignant peut cogérer le traitement médicamenteux de manière responsable. Discuter avec le patient et le soignant de l’importance de réévaluer et d’accroître la sécurité en matière de médicaments. 

Les bienfaits du traitement aux opioïdes pourraient  finir par diminuer ou les risques pourraient s’accroître avec le temps; il importe donc que les cliniciens revoient périodiquement avec les patients les attentes en matière de bienfaits et de risques associés aux opioïdes, au moins tous les 3 mois. 

Sélection de l’opioïde, posologie, durée, suivi et cessation  
       

4.  À l’initiation d’un traitement aux opioïdes pour la douleur chronique, les cliniciens devraient avoirs recours aux opioïdes à libération immédiate plutôt qu’aux opioïdes à libération ou à action prolongée (LP/AP).  


Les opioïdes à libération prolongée (LP) ou action prolongée (AP)
comprennent la méthadone, le fentanyl transdermique et les versions LP d’opioïdes tels que l’oxycodone (OxyContin), l’oxymorphone, l’hydrocodone et la morphine.  Le risque de surdose est plus élevé chez les patients qui commencent leur traitement avec les opioïdes LP/AP que chez ceux qui commencent leur traitement avec les opioïdes à libération immédiate.  Rien ne permet de prouver que la prise continue d’opioïdes LP/AP selon un calendrier fixe est plus efficace ou plus sécuritaire  que la prise intermittente d’opioïdes à libération immédiate, ni que la prise d’opioïdes LP/AP selon un calendrier fixe réduise les risques de mauvais usage des opioïdes ou de dépendance aux opioïdes. 
 

Les opioïdes LP/AP doivent être réservés à la « gestion d’une douleur de gravité suffisante pour nécessiter un traitement quotidien, 24 heures sur 24 et à long terme » quand « d’autres options de traitement (antalgiques non opioïdes ou opioïdes à libération immédiate) ne font pas effet, sont mal tolérés ou ne suffisent pas, pour d’autres raisons, à soulager appréciablement la douleur », et non pas à l’administration « au besoin » pour soulager la douleur.  Certains opioïdes LP/AP ne sont appropriés que pour les patients ayant une tolérance aux opioïdes, c’est-à-dire les patients qui prennent un certain dosage d’opioïdes (p. ex., 60 mg par jour de morphine orale, 30 mg par jour d’oxycodone orale ou un dosage d’effet antalgique équivalent) pendant au moins 1 semaine.  On peut associer la prise d’opioïdes selon un calendrier fixe à des dosages quotidiens totaux plus élevés que la prise intermittente d’opioïdes selon le besoin.  Les preuves font défaut pour affirmer que les opioïdes à libération immédiate sont sécuritaires pour soulager une douleur paroxystique quand des opioïdes LP/AP sont pris pour la douleur chronique autre que la douleur associée à un cancer actif, aux soins palliatifs ou aux soins en fin de vie, et cette pratique pourrait être associée à l’augmentation des doses. 

Bien qu’on estime que les technologies dissuasives d’abus rendront la manipulation des opioïdes plus difficile ou moins satisfaisante, elles n’empêcheront pas les abus d’opioïdes pris par voie orale, qui est la voie d’administration la plus susceptible d’abus, et des abus peuvent aussi avoir lieu par d’autres voies.  L’étiquette « dissuasive d’abus » n’indique pas que le risque d’abus est nul. 

Pour les patients qui ne prennent pas déjà des opioïdes, les cliniciens ne doivent pas initier le traitement aux opioïdes par des opioïdes LP/AP et ne doivent pas prescrire d’opioïdes LP/AP pour usage intermittent.  Le recours aux opioïdes LP/AP doit être réservé aux cas de douleur continue sévère et ne doit être envisagé que pour les patients qui prennent des opioïdes à libération immédiate tous les jours depuis au moins 1 semaine. 

Quand il s’agit de prescrire des opioïdes LP/AP, il est préférable d’avoir recours à ceux dont la pharmacocinétique et la pharmacodynamie sont prévisibles, afin de minimiser les risques de surdose involontaire.  Les caractéristiques inhabituelles de la méthadone et du fentanyl transdermique, en particulier, rendent spécialement difficile de prescrire ces médicaments pour la douleur en toute sécurité. 

  • La méthadone ne doit pas être l’opioïde LP/AP de premier recours.
     
  • Parce que les effets posologiques du fentanyl transdermique sont souvent mal compris tant par les cliniciens que par les patients, seuls les cliniciens habitués aux propriétés posologiques et d’absorption du fentanyl transdermique et qui sont prêts à instruire leurs patients quant à son usage devraient envisager d’en prescrire. 

5.  Au commencement du traitement aux opioïdes, le clinicien doit prescrire le dosage efficace le plus faible.  Le clinicien doit prendre toutes les précautions quand il prescrit toute posologie d’opioïdes, doit soigneusement réévaluer les faits probants quant aux bienfaits et aux risques pour chaque patient individuellement s’il envisage d’augmenter le dosage à ≥50 mg/jour d'équivalent morphine, et éviter de l’augmenter à ≥90 mg/jour d'équivalent morphine ou d’établir avec soin les justificatifs de sa décision d’ajuster la posologie à ≥90 mg/jour d'équivalent morphine.

Les bienfaits des opioïdes à dose élevé pour la douleur chronique ne sont pas prouvés.  Des essais randomisés ont montré aucune différence dans la douleur ou le fonctionnement entre la stratégie plus généreuse d’augmentation de la posologie d’opioïde et le maintien de la posologie établie.  Par ailleurs, le risque de torts importants attribuables au traitement aux opioïdes augmente quand la posologie d’opioïdes est plus élevée.

Dosage d’équivalent morphine en miligrammes pour les opiacés couramment prescrits. 

Opioïde                      Facteur de conversion

Codéine                                       0,15
Fentanyl transdermique
(en mcg/h)                                   2,4
Hydrocodone                              1
Hydromorphone                          4
Méthadone             
   1–20 mg/jour                            4
   21–40 mg/ jour                         8
   41–60 mg/ jour                         10
   ≥61–80 mg/ jour                       12
Morphine                                     1
Oxycodone                                  1,5
Oxymorphone                              3

Bien qu’il n’existe aucune posologie unique présentant un seuil en-dessous duquel l’élimination de tout risque de surdose est assurée, le fait de garder la posologie à <50 mg/jour d’équivalent morphine est susceptible de réduire le risque chez une forte proportion de patients qui subiraient une surdose mortelle si la posologie était plus élevée. 

Lorsqu’il a recours aux opioïdes pour la douleur chronique  autre que celle d’un cancer actif, de soins palliatifs ou de soins en fin de vie, le clinicien doit commencer le traitement en prescrivant le dosage efficace le plus faible, avec encore plus de prudence pour les patients de plus de 65 ans ou ayant des atteintes rénales ou hépatiques.  Le clinicien doit être prudent quand il augmente le dosage d’opioïdes et ne l’augmenter que par la plus faible quantité pratique.  Après avoir augmenté le dosage, le clinicien doit réévaluer le patient pour déceler les changements dans la douleur, le fonctionnement et les risques de dommage.  Avant d’augmenter le dosage d’opioïde à ≥50 mg/jour d'équivalent morphine, le clinicien doit de nouveau évaluer si le traitement aux opioïdes permet au patient d’atteindre ses objectifs de traitement.  Si le dosage d’opioïdes d’un patient atteint ou dépasse les 50 mg/jour d'équivalent morphine pour l’ensemble des sources d’opioïdes, le clinicien doit mettre en œuvre d’autres précautions, y compris la fréquence accrue du suivi.  Si les patients ne ressentent aucune amélioration de leur fonctionnement ou du soulagement de la douleur à des doses de ≥90 mg/jour d'équivalent morphine, ou s’ils ressentent le besoin d’une augmentation du dosage, le clinicien devrait discuter avec le patient d’autres approches de gestion de la douleur, ou envisager d’entreprendre avec le patient une stratégie de diminution du dosage des opioïdes ou de diminution et d’abandon des opioïdes, ou songer à consulter un spécialiste de la douleur. 

Les patients établis qui prennent déjà de fortes doses d’opioïdes, tout comme les patients qui sont transférés par un autre clinicien, pourraient trouver que la possibilité de réduire leur dosage d’opioïdes leur cause de l’anxiété.  La diminution progressive des opioïdes peut s’avérer particulièrement difficile lorsque la prise de doses élevées s’étend sur plusieurs années, en raison de la dépendance physique et psychologique.  Ces patients devrait toutefois se voir offrir l’occasion de réévaluer leur usage continu de fortes doses d’opioïdes étant donné qu’on a démontré récemment un lien entre la posologie d’opioïdes et le risque de surdose.  Le clinicien doit, sans porter de jugement,  expliquer aux patients qui prennent déjà de fortes doses d’opioïdes (de ≥90 mg/jour d'équivalent morphine) qu’il existe des preuves scientifiques que le risque de surdose augmente quand le dosage d’opioïdes est plus élevé.  Le clinicien doit revoir avec insistance les bienfaits et les risques de poursuivre le traitement aux opioïdes à forte dose et offrir au patient ses services d’accompagnement dans la diminution graduelle des opioïdes pour atteindre une dose plus sécuritaire.  

6. L'usage à long terme des opioïdes commence souvent en réponse à une douleur aiguë.  Quand les opioïdes sont utilisés en traitement de la douleur aiguë, le clinicien doit prescrire le dosage efficace le plus faible d’opioïdes à libération immédiate et ne pas en prescrire une plus grande quantité que pour la durée prévue d’une douleur dont la sévérité nécessite l’usage d’opioïdes.  Trois jours ou moins suffisent souvent et il est rare que le besoin dépasse sept jours.

L’usage d’opioïdes pour la douleur aiguë (c.-à-d. une douleur apparue soudainement à la suite d’une blessure ou autre atteinte non continue) est associé à l’usage à long terme des opioïdes, et l’exposition hâtive à une plus grande quantité d’opioïdes est associée à un risque plus élevé d’un usage à long terme.  Une exposition aux opioïdes qui dépasse quelques jours s’accompagne d’une hausse significative du risque, et chaque jour d’usage non nécessaire fait augmenter la probabilité d’une accoutumance physique sans bienfaits supplémentaires.  Les ordonnances d’une provision de moins de jours font également diminuer le nombre de comprimés disponibles pour le détournement accidentel ou intentionnel. 

Parfois la douleur aiguë peut être soulagée sans opioïdes.  Il est important d’évaluer le patient pour déceler des causes réversibles de douleur ou une étiologie sous-jacente aux séquelles éventuellement graves, afin de déterminer le traitement approprié.  Quand le diagnostic et la gravité de la douleur aiguë non liée à un traumatisme ou à une chirurgie semblent raisonnablement justifier l’usage d’un opioïde, le clinicien ne doit en prescrire que la quantité correspondant à la durée prévue d’une douleur dont la sévérité nécessite l’usage d’opioïdes, souvent 3 jours ou moins, sauf si les circonstances justifient clairement un traitement aux opioïdes de plus longue durée.  Il est rare que ce besoin se fasse sentir plus de 7 jours.  Le clinicien ne doit pas prescrire un supplément d’opioïdes « juste au cas » où la douleur persisterait plus longtemps que prévu.  Le clinicien doit réévaluer le sous-groupe de patients souffrant d’une douleur aiguë qui persiste au-delà de la durée prévue, afin de confirmer ou de réviser le diagnostic initial et de rajuster les modalités de gestion en conséquence.  Étant donné la demi-vie plus longue et la durée plus longue des effets (p. ex. la dépression respiratoire) des opioïdes LP/AP tels que la méthadone, les timbres de fentanyl ou les versions à libération prolongée d’opioïdes tels que l’oxycodone, l’oxymorphone ou la morphine, les cliniciens ne devraient pas prescrire d’opioïdes LP/AP pour le traitement de la douleur aiguë. 

7.  Le clinicien doit évaluer les bienfaits et les effets nocifs avec son patient dans un délai de 1 à 4 semaines après le début du traitement aux opioïdes pour la douleur chronique ou après une augmentation de la dose.  Le clinicien doit évaluer les bienfaits et les effets nocifs de la poursuite du traitement à tous les 3 mois ou plus fréquemment.  Si les bienfaits ne l’emportent pas sur les effets nocifs de la poursuite du traitement aux opioïdes, le clinicien doit optimiser l’usage d’autres traitements et travailler avec le patient pour diminuer graduellement les doses d’opioïdes ou diminuer graduellement et cesser la prise d’opioïdes. 

Un traitement aux opioïdes qui se poursuit sur 3 mois fait augmenter le risque d’un trouble de la consommation d’opioïdes; un suivi avant 3 mois pourrait s’imposer pour maximiser les chances d’éviter l’apparition d’un tel trouble.  De plus le risque de surdose associé aux opioïdes LP/AP pourrait être particulièrement élevé pendant les 2 premières semaines de traitement.  Chez les patients qui ne ressentent pas de soulagement de la douleur après 1 mois d’usage d’opioïdes, il est peu probable qu’ils ressentiront du soulagement après 6 mois d’usage.  La réévaluation de la douleur et du fonctionnement 1 mois après le début de la prise d’opioïdes donne l’occasion de minimiser les risques que pose l’usage prolongé des opioïdes en cessant d’en prescrire aux patients qui ne bénéficient pas nettement de ces médicaments.  Le risque d’une surdose aux opioïdes est le plus élevé entre le 3e et le 7e jour après le début de la prise d’opioïdes ou après l’augmentation de la dose, en particulier lorsqu’il s’agit de la méthadone ou du fentanyl transdermique.  Le suivi après 3 jours est approprié après le début du traitement à la méthadone ou de l’augmentation de la dose; un suivi après 1 semaine peut être approprié lorsqu’il s’agit du début de traitement d’autres opioïdes LP/AP ou de l’augmentation de leur dosage. 

Le clinicien doit évaluer chez le patient les bienfaits et les effets nocifs des opioïdes dans un délai de 1 à 4 semaines après le début d’un traitement à long terme aux opioïdes ou après l’augmentation du dosage.  Un intervalle entre les suivis se situant vers le bas de cet écart devrait être envisagé lorsque commence le traitement aux opioïdes LP/AP ou quand la dose augmente, ou lorsque la dose quotidienne totale est de ≥50 mg/jour d’équivalent morphine.  Il est fortement conseillé d’envisager un intervalle plus court (3 jours ou moins) entre les suivis quand il s’agit du début d’un traitement à la méthadone ou d’une augmentation de son dosage.  Lors du suivi le clinicien doit évaluer les bienfaits au plan du fonctionnement, de la gestion efficace de la douleur et de la qualité de vie à l’aide d’un instrument tel que celui à trois question de l’échelle d’évaluation PEG mesurant l’intensité de la douleur et la perturbation de la qualité de vie et des activités générales (Pain average, interference with Enjoyment of life, and interference with General activities Assessment Scale), ou encore interroger le patient sur son cheminement pour atteindre les objectifs fonctionnels qui ont un sens pour lui.  Le clinicien se renseigner auprès du patient des effets indésirables courants tels que la constipation ou la somnolence, et questioner et évaluer les effets pouvant être les signes précurseurs de problèmes plus graves, tels que la surdose (p. ex. sédation ou trouble de l’élocution) ou d’un trouble de la consommation d’opioïdes (p. ex. les fringales, le désir de prendre les opioïdes en plus grande quantité ou plus fréquemment que prescrits ou la difficulté à contrôler la consommation).  Le clinicien doit demander au patient ses préférences pour ce qui est de continuer le traitement aux opioïdes compte tenu de leur effet sur sa douleur et son fonctionnement par rapport aux effets indésirables subis. 

Le clinicien doit réévaluer plus souvent qu’à tous les 3 mois les patients qui sont exposés à un risque plus élevé d’un trouble de la consommation d’opioïdes ou d’une surdose, par exemple, les patients atteints de dépression ou d’autres troubles de santé mentale, ayant des antécédents d’un trouble de la consommation de drogues ou autres substances, ayant des antécédents de surdose, qui prennent ≥50 mg/jour d’équivalent morphine ou qui prennent d’autres dépresseurs du système nerveux central en même temps que les opioïdes. 

Évaluer le risque et remédier aux effets nocifs de l’usage d’opioïdes 

8.  Avant de commencer et à intervalles durant le traitement aux opioïdes, le clinicien doit évaluer les facteurs de risque des effets nocifs connexes.  Le clinicien doit intégrer au plan de gestion des soins des stratégies d’atténuation des risques, y compris l’offre de la naloxone, en présence de facteurs d’accroissement du risque de surdose aux opioïdes tels que des antécédents de surdose, un trouble antérieur de consommation de drogues ou autres substances, un dosage élevé d’opioïdes (≥50 mg/jour d’équivalent morphine) ou l’usage concomitant de benzodiazépine.  

Il est probable que certains facteurs de risque fassent augmenter la susceptibilité aux effets nocifs attribuables aux opioïdes et justifient l’inclusion au plan de gestion des soins de stratégies supplémentaires pour atténuer le risque. 

9.  Le clinicien doit examiner les antécédents du patient quant à ses ordonnances de médicaments réglementés à l’aide des données du Programme de surveillance des médicaments (PSM), afin de déterminer si le patient prend des doses d’opioïdes ou des combinaisons dangereuses de médicaments qui l’exposent à un risque élevé de surdose.  Le clinicien doit examiner les données du PSM au début du traitement aux opioïdes pour la douleur chronique et à intervalles durant le traitement, soit lors de chaque renouvellement ou à intervalles de 3 mois au maximum. 

La plupart des surdoses mortelles sont associées à l’obtention d’opioïdes auprès de plusieurs prescripteurs ou à la prise d’une dose quotidienne totale élevée d’opioïdes.  Idéalement les données du PSM devraient être consultées avant de prescrire tout opioïde. 

S’il s’avère qu’un patient prend une dose élevée d’opioïdes ou une combinaison dangereuse de médicaments ou qu’il a obtenu plusieurs ordonnances de substances réglementées auprès de différents cliniciens, plusieurs démarches peuvent accroître la capacité du clinicien à améliorer la sécurité du patient, notamment : 

  • Le clinicien doit discuter des renseignements fournis par le PSM avec son client et confirmer que le patient est au courant des ordonnances supplémentaires. 

  • Le clinicien doit discuter des questions de sécurité, y compris du risque accru de dépression respiratoire et de surdose, avec les patients dont le dossier indique qu’ils reçoivent des opioïdes de plus d’un prescripteur ou qui reçoivent des médicaments qui augmentent le risque quand ils sont pris en combinaison avec des opioïdes (comme les benzodiazépines), et envisager de leur offrir de la naloxone. 

  • Le clinicien doit éviter de prescrire des opioïdes et des benzodiazépines simultanément, dans la mesure du possible. 

  • Le clinicien doit calculer la quantité (mg) par jour d’équivalent morphine que représentent les ordonnances concomitantes d’opioïdes afin de mieux évaluer les risques de surdose chez le patient.  S’il est établi que le client reçoit un dosage quotidien total élevé d’opioïdes, le clinicien doit discuter de ses inquiétudes ayant trait à la sécurité avec le patient, envisager une diminution graduelle jusqu’à une dose plus sécuritaire et envisager de lui offrir de la naloxone. 

  • Le clinicien doit discuter de ses inquiétudes ayant trait à la sécurité avec les autres cliniciens qui prescrivent des substances réglementées à son patient. 

  • Le clinicien doit tenir compte de la possibilité d’un trouble de la consommation de drogues ou autres substances et discuter de ses inquiétudes avec le patient. 

  • Si le clinicien soupçonne que son patient partage ou vend les opioïdes prescrits au lieu de les prendre, il doit envisager de lui faire passer un test urinaire de dépistage de drogue pour déterminer si le traitement aux opioïdes peut être interrompu sans causer d’effet de sevrage.  Un résultat négatif du test de dépistage pourrait signaler que le patient ne prend pas les opioïdes prescrits, mais le clinicien doit envisager la possibilité qu’il y ait d’autres explications à ce résultat. 

Le clinicien ne doit pas congédier un patient de sa pratique en se basant seulement sur les renseignements fournis par le PSM. 

10.  Quand il prescrit des opioïdes pour la douleur chronique, le clinicien doit faire faire un test urinaire de dépistage de drogue avant d’entamer le traitement, et envisager de répéter le dépistage au moins une fois par an, afin d’évaluer la présence des médicaments prescrits ainsi que d’autres médicaments d’ordonnance réglementés et de drogues illicites. 

L’usage concomitant d’analgésiques opioïdes avec d’autres analgésiques opioïdes, des benzodiazépines ou de l’héroïne peut accroître le risque de surdose. Le dépistage de drogues au moyen d’une analyse d’urine fournit de l’information sur l’usage de substances que le patient n’a pas signalées. De plus le dépistage permet au clinicien de savoir si le patient ne prend pas les opioïdes qui lui ont été prescrits, ce qui pourrait dans certains cas relever du détournement mais qui pourrait aussi signaler des questions d’importance clinique telles que des difficultés relatives aux effets indésirables.  Cependant il faut savoir que le dépistage toxicologique courant ne fournit pas de preuves irréfutables d’un détournement.  Pour les obtenir, il faut demander des analyses spécifiques. 

11.  Dans la mesure du possible, le clinicien doit éviter de prescrire des analgésiques opioïdes et des benzodiazépines en concomitance. 

Tant les benzodiazépines que les opioïdes causent une dépression du système nerveux central et peuvent affaiblir la pulsion respiratoire.  L’usage concomitant hausse probablement les risques pour le patient puisqu’il quadruple le risque de surdose mortelle par rapport à l’usage d’opioïdes seulement.  Bien qu’il pourrait être approprié, dans certaines circonstances, de prescrire des opioïdes à un patient qui prend de la benzodiazépine (par exemple pour une douleur aiguë sévère chez un patient qui reçoit un traitement stable de benzodiazépine à faible dose), il reste que le clinicien doit éviter, tant que possible, de prescrire des analgésiques opioïdes et des benzodiazépines en concomitance.  Parce que le sevrage de la benzodiazépine comporte un plus grand risque que le sevrage d’opioïdes et parce que la diminution graduelle des opioïdes est anxiogène, il pourrait être plus sécuritaire de commencer par diminuer progressivement la dose d’opioïdes quand il devient nécessaire de diminuer les dosages afin de réduire le risque de dépression respiratoire mortelle chez le patient qui prend les deux médicaments.  Un échéancier courant pour la diminution graduelle, qui est utilisé en toute sécurité et avec un succès modéré, est de réduire la dose de benzodiazépine de 25 % à intervalles de 1 à 2 semaines. 

12.  Le clinicien doit offrir ou prendre les arrangements pour que soit offert un traitement basé sur les faits scientifiques (ordinairement il s’agit de traitements avec assistance médicamenteuse de la buprénorphine ou de la méthadone conjugués à des thérapies comportementales) aux patients ayant un trouble de consommation d’opioïdes. 

La 5e édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5) définit le trouble de la consommation d’opioïdes comme un schéma problématique d’utilisation d’opioïdes conduisant à une altération du fonctionnement ou à une souffrance cliniquement significative. 

La prévalence dans les milieux de soins primaires de la dépendance aux opioïdes chez les patients qui suivent un traitement aux opioïdes pour la douleur chronique peut atteindre de 3 à 26 %. Il a été prouvé que les traitements aux agonistes ou agonistes partiels opioïdes, à l’aide de la buprénorphine ou d’un traitement de substitution à la méthadone, sont les plus efficaces pour prévenir les rechutes chez les patients souffrant d’un trouble de l’utilisation d’opioïdes. 

Lorsque son patient répond aux critères du trouble de l’utilisation d’opioïdes, le clinicien doit offrir ou prendre les arrangements pour que lui soit offert un traitement basé sur les faits scientifiques. Ordinairement il s’agit d’un traitement avec assistance médicamenteuse, à l’aide de la buprénorphine ou d’un traitement de substitution à la méthadone, combiné à des thérapies comportementales.
 

Abrégé modifié et traduit du CDC Guideline for prescribing Opioids for Chronic Pain—États-Unis 2016